
La région Normandie a initié un ambitieux projet quant au développement de la méthanisation sur son territoire.
Ce plan intervient dans le cadre de la politique globale de transition énergétique régionale. Ainsi, la Région Normandie consacrera 12 millions d’euros au Plan de développement de la méthanisation entre 2018 et 2020. Cette enveloppe sera augmentée des aides de l’ADN et de l’ADEME et par les contributions directes des syndicats d’énergie.
On compte actuellement en Normandie 80 méthaniseurs généralement en cogénération (production de chaleur et d’électricité). La dynamique observée ces dernières années est vive avec une moyenne de 5 à 6 mises en service par an depuis 2010 et l’objectif de la Région est de 400 dans 20 ans.
Pour le Calvados – en retard sur les autres départements -, le SDEC Energie proposait aux différents acteurs des ateliers afin de mieux les informer et sensibiliser sur cette alternative aux énergies fossiles.
Rien de mieux que d’aller sur le terrain, en l’occurrence la commune de
Croisilles et de s’imprégner d’expériences concrètes en la matière, une opportunité d’éradiquer les peurs et les « idées reçues » handicapant la mise en œuvre de telles installations en France pour en faire un atout pour les acteurs du territoire.

De quoi parle-t-on ?
La méthanisation est l’utilisation d’un processus biologique qui transforme la
matière organique (effluents agricoles, boues de station d’épuration, restes alimentaires, déchets verts…) en 2 produits, le biogaz, mélange gazeux principalement composé de
méthane et de
dioxyde de carbone, et le digestat, utilisable comme engrais dans les exploitations agricoles.
Ce procédé a de nombreux atouts :
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La production locale d’énergie renouvelable
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L'utilisation du bio méthane, dans le secteur des transports par exemple, en substitution des ressources fossiles
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La valorisation des bio-déchets et de la matière organique
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La substitution du digestat aux engrais chimiques.
Pour un véritable projet territorial

Le projet de méthanisation collective de la
SAS AGRIGAZ de Vire est particulièrement exemplaire en termes de développement territorial.
Lancé en 2009 à l’initiative d’une dizaine d’agriculteurs du bocage, supporté par les collectivités locales, le projet s’est concrétisé en 2014 –labellisé GIEE en 2015 -intégrant de nombreux acteurs locaux.
Il est implanté au cœur d’un
pôle Environnement incluant une nouvelle déchetterie, près du Lycée Agricole au Nord-est de la ville.
Pour un investissement de 11 M€, il pourra traiter annuellement 64 000 tonnes dont 40 000 de déchets animaux provenant de 80 exploitations. Remarquablement, le gaz obtenu sera directement injecté dans le réseau GRDF tout proche.
« Seules, 2000 tonnes de cultures dédiées viendront en appoint» précise le responsable du projet.
Ce dernier évoque les difficultés liées aux démarches administratives complexes parfois incohérentes et au nombre d’acteurs à coordonner.
« L’Allemagne, très en avance sur nous, a une législation moins contraignante » a-t-il ajouté en indiquant que cette relative permissivité a généré certaines dérives.
La communication et la
concertation avec les riverains se sont engagées bien en amont des processus légaux.
«Les riverains ont pu visiter une unité équivalente en Bretagne et ont été associés en temps réel » se félicite le responsable du projet.
Les travaux sont presque terminés, réalisés par une entreprise …allemande, la montée en charge s’opérant en 2020.
Une expérience exemplaire

La visite du GAEC de
Jan Meilink est encore plus édifiante. Ce dernier, fort de son expérience dans son pays d’origine, la Hollande, s’est implanté à Croisilles il y a une vingtaine d’années.
Plus récemment , il s’est lancé dans une modèle agricole particulièrement innovant .Il a en effet construit autour de l’implantation d’un méthaniseur de taille moyenne ( 11000 Tonnes par an) un véritable modèle économique sollicitant un ensembles d’énergies renouvelables complémentaires, une démarche d’
économie circulaire avant la lettre.
Outre le biogaz et la génération d’électricité grâce au méthaniseur, il a installé des panneaux photovoltaïques et thermiques.

Plus remarquablement, les différentes sources de chaleur lui ont permis de créer un immense
atelier de séchage pour traiter son foin et en faire un aliment exceptionnel pour son bétail, évitant tout complément alimentaire.
Cet atelier est également sollicité pour sécher du bois et d’autres céréales et légumineuses. Jan met d’ailleurs à disposition ses installations à d’autres agriculteurs.
Principalement producteur de lait- label « lait de foin » -, il assure ainsi une grande autonomie énergétique en s’appuyant sur 320 Ha de cultures et prairies.
Le visiteur sera impressionné par l’absence d’odeur à proximité ni de bruit, si ce n’est celle de foin séché donné aux vaches.
Jan Meilink se déclare très satisfait des lourds investissements qu’il a entrepris et ne compte pas s’arrêter là.
Epilogue
De cette visite, il ressort que la méthanisation souvent diabolisée est un réel atout au moins dans le monde rural et un contexte d’économie circulaire tant recherché.
En y restant à taille raisonnable, cette technique encore évolutive doit s’intégrer dans un modèle économique cohérent et élargi qui en assurera sa rentabilité.

07/10/2019